RDC : La poursuite des combats plonge des millions d’enfants dans l’insécurité alimentaire (par ONU Info)
Kinshasa, RDC (PANA) - La détérioration rapide de la sécurité alimentaire en République démocratique du Congo (RDC) expose plus de quatre millions d'enfants de moins de cinq ans au risque de malnutrition aiguë.
Les causes comprennent le conflit armé en cours, les déplacements massifs de population et la détérioration persistante des conditions sanitaires.
Parmi ces enfants, plus de 1,3 million souffrent déjà de la forme la plus grave de malnutrition, qui met directement leur vie en danger, selon les nouvelles données de la Classification intégrée de la sécurité alimentaire (IPC), un groupe d'experts internationaux faisant autorité en la matière.
La crise touche également les adultes les plus vulnérables. Environ 1,5 million de femmes enceintes ou allaitantes devraient souffrir de malnutrition et nécessiter un traitement pendant la même période.
Cette détérioration de la situation humanitaire s'inscrit dans un contexte sécuritaire en pleine mutation dans l'Est du pays. Le M23, un groupe armé qui prétend défendre les Tutsis congolais, a lancé ces derniers jours une nouvelle offensive dans la province du Sud-Kivu, s'emparant de plusieurs villes, dont Uvira, tombée le 9 décembre après d'intenses combats.
Située sur les rives du lac Tanganyika, Uvira avait récemment été désignée capitale provisoire du Sud-Kivu après la prise de Bukavu par les rebelles en février, dans le cadre d'une campagne militaire éclair lancée plus tôt cette année.
La stratégie d'expansion territoriale du M23 lui a permis de prendre le contrôle de nombreuses villes du Sud-Kivu, ainsi que du Nord-Kivu voisin, notamment Goma, la principale ville de la province. Cette avancée méthodique modifie les lignes de front et affaiblit encore l'autorité de l'Etat congolais dans une région déjà ravagée par des décennies de conflit.
Le 12 décembre, le chef des opérations de maintien de la paix de l'ONU, Jean-Pierre Lacroix, a déclaré au Conseil de sécurité que la prise d'Uvira s'était accompagnée d'une " escalade militaire à grande échelle " opposant les combattants du M23 — avec le soutien présumé des forces armées rwandaises — à l'armée congolaise, soutenue par des soldats burundais et les groupes d'autodéfense Wazalendo, alliés au gouvernement de Kinshasa.
La reprise des combats est survenue au lendemain de la conclusion, le 4 décembre à Washington, d'un accord de paix entre le président de la RDC, Félix Tshisekedi et son homologue rwandais; Paul Kagame, signé sous les auspices du président américain, Donald Trump.
Cet accord faisait suite à plusieurs avancées diplomatiques récentes, notamment un accord-cadre signé le 15 novembre à Doha entre la RDC et le M23, ainsi que la mise en place, en octobre, d'un mécanisme conjoint de surveillance du cessez-le-feu entre Kinshasa et le groupe rebelle. Ces multiples initiatives avaient nourri l'espoir d'une désescalade, espoir rapidement anéanti par les événements sur le terrain.
Les conséquences humanitaires de cette nouvelle phase du conflit sont immédiates. Les combats dans le Sud-Kivu ont entraîné la suspension des activités humanitaires dans les villes de Fizi et Baraka, situées à environ 80 kilomètres d'Uvira.
Depuis le 8 décembre, les autorités locales estiment qu'environ 110 000 personnes ont fui vers d'autres régions de la province, tandis que des milliers d'autres ont traversé la frontière vers le Burundi et que certaines ont poursuivi leur route vers la Tanzanie.
La plupart des familles déplacées trouvent refuge dans des espaces publics, sans accès régulier à l'aide humanitaire. Des pillages commis par des hommes armés ont également été signalés, alimentant un climat de panique parmi les civils.
Face à la recrudescence de la violence, Washington a durci sa position. Selon la presse, lundi, l'ambassadrice américaine en RDC, Lucy Tamlyn, a souligné la responsabilité du Rwanda et affirmé l'engagement de son pays à respecter l'accord de paix de Washington.
" Nous examinons tous les outils diplomatiques possibles, les sanctions, ainsi que les activités bilatérales et multilatérales pour garantir le respect des engagements pris ", a-t-elle déclaré lors d'une conférence de presse à Kinshasa.
Mardi, les rebelles ont annoncé qu'ils avaient accepté la demande américaine de se retirer d'Uvira.
Dans un message publié sur X, Corneille Nangaa, chef de l'Alliance des forces congolaises (AFC), la coalition armée à laquelle est affilié le M23, a déclaré que les combattants se retireraient de la ville, " conformément à la demande de médiation américaine ". Reste à voir si cette annonce se traduira par un retrait effectif et durable sur le terrain.
Au niveau national, près de 25 millions de personnes, soit plus d'un cinquième de la population de la RDC, souffrent déjà d'une insécurité alimentaire aiguë. Trois territoires de l'Est — Djugu et Mambasa, en Ituri, et Masisi, au Nord-Kivu — ont récemment atteint le seuil d'" urgence ".
Les projections pour le premier semestre 2026 sont encore plus inquiétantes. " Cette situation, combinée à la réduction prévue de l'aide alimentaire humanitaire, exposera les populations vulnérables à un risque accru d'insécurité alimentaire aiguë ", préviennent les experts.
-0- PANA MA/NFB/IS 17dec2025




