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La faim au Soudan est causée par le conflit, selon des responsables de l'ONU

New York, US (PANA) - Après onze mois de combats brutaux, une crise de la faim sévit au Soudan, certaines régions risquant de connaître des niveaux catastrophiques d'insécurité alimentaire d'ici la période de soudure en mai, a-t-on appris mercredi auprès du Conseil de sécurité de l'ONU. 

"Alors que nous approchons du premier anniversaire du conflit, nous ne pouvons pas rendre plus clair le désespoir auquel les civils sont confrontés au Soudan", a déclaré Edem Wosornu, du Bureau des affaires humanitaires des Nations Unies (OCHA), l'un des trois hauts fonctionnaires qui ont informé les ambassadeurs.

La réunion a été convoquée à la suite de la présentation par l'OCHA d'un livre blanc sur l'insécurité alimentaire au Soudan vendredi dernier, selon un communiqué de l'ONU. 

Cela a été fait conformément à une résolution du Conseil de 2018 qui demande au Secrétaire général de l'ONU de signaler rapidement tout risque de famine induite par un conflit et d'insécurité alimentaire généralisée.

La guerre entre l'Armée soudanaise et les Forces paramilitaires de soutien rapide (FSR), a plongé 18 millions de personnes dans une insécurité alimentaire aiguë.

La majorité d'entre elles, soit environ 90%, se trouve dans les zones de conflit de la région du Darfour et du Kordofan, ainsi que dans les États de Khartoum et d'Al Jazirah.

Les combats ont limité la production agricole, endommagé les principales infrastructures, provoqué une flambée des prix et perturbé les flux commerciaux, entre autres effets dévastateurs.

Maurizio Martina, directeur général adjoint de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), a signalé que les hostilités s'étendaient aux États du Sud-Est, le grenier à blé du pays, responsable de la moitié de la production totale de blé.

Un rapport de la FAO publié cette semaine montre que la production céréalière de l'année dernière a chuté de près de la moitié, soit 46%.

"Les besoins d'importation de céréales en 2024 prévus à environ 3,38 millions de tonnes, soulèvent des inquiétudes quant à la capacité financière et logistique du pays à répondre à ces besoins d'importation. De plus, les coûts de production élevés des céréales risquent de faire encore grimper les prix du marché, qui sont déjà à des niveaux exceptionnellement élevés", a-t-il ajouté.

Actuellement, environ 730 000 personnes au Soudan souffrent de malnutrition, qui atteint des taux alarmants et fait déjà de jeunes victimes.

Mme Wosornu a cité un rapport récent de Médecins Sans Frontières (MSF) qui révèle qu'un enfant meurt toutes les deux heures dans le camp de Zamzam à El Fasher, au Darfour Nord. 

"Nos partenaires humanitaires estiment que dans les semaines et les mois à venir, quelque 222 000 enfants pourraient mourir de malnutrition.

Bien que l'aide constitue "une bouée de sauvetage" au Soudan, elle a déclaré que les humanitaires continuaient à rencontrer des obstacles pour atteindre les personnes dans le besoin.

Le Conseil a adopté au début du mois une résolution appelant à un accès humanitaire total et sans entrave au Soudan. Cependant, "il n'y a pas eu de progrès majeurs sur le terrain". 

Mme Wosornu a déclaré que les organisations humanitaires avaient accueilli favorablement l'annonce récente du Soudan d'autoriser à nouveau l'entrée de l'aide dans le pays par le poste frontière de Tine avec le Tchad, bien que les procédures doivent encore être précisées.

Les autorités ont également accepté de permettre à 60 camions d'entrer au Darfour occidental par Adre, au Tchad, et un convoi transportant de l'aide alimentaire pour plus de 175 000 personnes est en cours de préparation en vue d'un déploiement dans les prochains jours. 

"Il s'agit de mesures positives, mais elles sont loin d'être suffisantes face à la famine qui menace", a-t-elle ajouté, soulignant la nécessité d'une livraison d'aide transfrontalière à l'intérieur du Soudan, ainsi que d'une plus grande protection du personnel et des fournitures humanitaires.

Le directeur exécutif adjoint du Programme alimentaire mondial des Nations unies (PAM), Carl Skau, a souligné le contexte régional plus large de la crise de la faim. 

Sept millions de personnes au Sud-Soudan et près de trois millions au Tchad sont également confrontées à une insécurité alimentaire aiguë, a-t-il déclaré.

Les équipes du PAM ont travaillé 24 heures sur 24 au Soudan pour répondre aux besoins massifs, aidant quelque huit millions de personnes l'année dernière, mais leurs opérations sont entravées par le manque d'accès et de ressources. 

"Si nous voulons éviter que le Soudan ne devienne la plus grande crise alimentaire du monde, il est urgent et essentiel de coordonner les efforts et de mettre en place une diplomatie commune. Nous avons besoin que toutes les parties fournissent un accès illimité à travers les frontières et les lignes de conflit", a déclaré M. Skau. 

Avertissant que l'aggravation de la faim ne fera qu'attiser l'instabilité dans la région, il a lancé un appel pour une augmentation rapide du soutien financier et politique aux opérations d'aide d'urgence.  

-0- PANA MA/MTA/IS/SOC 21mars2024