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Arrestation du célèbre journaliste tunisien Zied el Heni

Tunis, Tunisie (PANA) - Figure de proue de la scène médiatique en Tunisie, le journaliste Zied el Heni, a été maintenu en détention mercredi au lendemain de son interpellation sous l’accusation d’outrage au président de la République, selon son avocate, Dalila Msaddek.

Connu pour son franc-parler, même à l’époque de l’ancien président autocratique, il a fait l’objet d’une arrestation spectaculaire mardi par une dizaine de policiers qui se sont rendus à son domicile à la Cité des journalistes à l’Ariana, une banlieue de la capitale, lui ont présenté une convocation judiciaire et l’ont conduit illico-presto à la caserne de la Garde nationale d’El-Aouina, à Tunis, selon le témoignage de son épouse, Thouraya.

 Celle-ci a dû vivement protester pour être finalement autorisée par les agents de la Garde nationale de remettre à son époux les médicaments qu’il doit impérativement prendre en raison de son état de santé particulièrement fragile. Zied el Heni suit depuis un certain temps un traitement anti-cancéreux, selon ses proches.

  Après un interrogatoire par la 5e Brigade centrale pour la lutte contre les crimes de télécommunications, sans la présence de ses avocats, il a été placé en garde à vue.

  En vertu du très controversé Décret 54 promulgué par le Président Kaïs Saied qui régit les délits d’atteinte aux fonctionnaires de l’Etat et de diffusion de fausses informations, il risque jusqu’à 10 ans d’emprisonnement s’il est reconnu coupable.

 Selon son avocate, le journaliste a été interpellé suite à son intervention sur une radio privée dans laquelle il s’interrogeait, d’une manière satirique, sur le sens de l’accusation d’outrage au président de la République. « Cela peut être le cas quand un président reçoit une gifle, un œuf, ou quand quelqu’un lui passe une datte » a-t-il dit? suscitant l’hilarité des chroniqueurs présents.

  L’interpellation de ce « journaliste rebelle » a provoqué une vague de sympathie dans les médias et auprès des organisations de la société civile.

  Le syndicat des journalistes tunisiens a, dans un communiqué, exprimé son « soutien total » à Zied El Heni et appelé à une manifestation pour exiger sa libération.

  Dans une pétition publiée sur le réseau social Facebook, des dizaines de journalistes ont appelé les autorités à libérer immédiatement le journaliste Zied el-Heni et à abandonner les charges retenues contre lui.

   Les signataires estiment que les déclarations du « journaliste traqué » sont au cœur de son métier qui consiste notamment à interpréter et commenter les événements d'intérêt public.

   Ils expriment leur solidarité avec la famille de Zied el Heni, et appellent toutes les organisations syndicales et de défense des droits de l'homme à défendre la liberté de la presse et d'expression menacée depuis la promulgation du fameux Décret 54.

   De son côté, la « Commission nationale pour la défense des libertés et de la démocratie » a dénoncé la hâte de sa mise en détention et l’interdiction  à ses avocats d’assister à son interrogatoire, en violation flagrante des droits de la défense garantis par la loi.

  Elle considère cette arrestation comme une nouvelle étape de la campagne déclenchée en février dernier, qui a conduit à l’emprisonnement de dizaines d’opposants au régime « sans aucune base légale ».

  La commission appelle toutes les forces démocratiques qui militent pour la démocratie à intensifier leurs efforts pour la libération des prisonniers politiques et pour l’abrogation des décrets restreignant les libertés.

-0- PANA BB/IS/SOC 21juin2023