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Un journal libyen sceptique par rapport à l'avenir du dialogue politique libyo-libyen

Tripoli, Libye (PANA) - L'hebdomadaire libyen "Al Wassat" qui partait au Caire, en Egypte, a exprimé, jeudi, des craintes de voir se compromettre le processus des dialogues militaire, politique et économique en Libye.

 

Sous le titre "Décontenance et flou règnent sur le processus de sortie de crise", le journal écrit : "les différends sont dans les détails au moment où piétinent tous les processus politiques".

 

Sur la question, le journal souligne que la cheffe de la Mission des Nations Unies d'appui en Libye, Stephanie Williams, a voulu attirer l'attention de tous sur le fait que l'objectif non annoncé est de "bloquer volontairement" le dialogue libyen, en exhortant les différentes parties et les membres de la commission réglementaire issue du Forum du dialogue politique libyo-libyen à mettre l'accent sur "la nécessité d'éviter de s'éterniser sur les questions marginales sans valeurs".

 

L'autorité constituante pour le projet constitutionnel n'a pas accepté la déclaration sur l'instauration de la commission réglementaire devant trouver un accord sur les arrangements constitutionnels conduisant aux élections, rappelle-t-on.

 

Selon des observateurs, le refus de l'autorité est consécutif à la volonté de la Mission de l'ONU de réviser certains articles du projet de la Constitution, réalisé auparavant par une autorité élue et déléguée par le peuple libyen et qui s'est engagée à respecter la Déclaration constitutionnelle et les décisions de la Cour suprême.

 

D'autres observateurs voient, pour leur part, que l'objectif visé par la création de la commission est de dépasser l'obstacle lié à la présidence de la Chambre des représentants du peuple (Parlement) pour la présentation et l'adoption du projet constitutionnel et pour permettre la tenue d'un référendum sur le projet au moment où les différends persistent entre les membres du Parlement sur la "priorisation" du choix du président du Conseil présidentiel pour lequel l'actuel président du Parlement, basé à Tobrouk (Est), divisé et bloqué, Aguila Salah est candidat.

 

Ces observateurs ajoutent que l'objectif définitif de la commission est de changer le Conseil présidentiel de crainte de voir Aguila Salah exclu définitivement de la scène politique libyenne. Cette question a eu des répercussions sur la réunion consultative de la Chambre des représentants du peuple à Ghadamés à laquelle 127 députés ont pris part et qui a été renvoyée pour la semaine prochaine à cause du manque de moyens financiers pour la prise en charge du transport des participants et de différends sur la personnalité qui doit présider la rencontre, souligne le journal.

 

Parmi les difficultés auxquelles sont confrontés les participants à la réunion figure aussi le différend entre les députés de l'Est et ceux du Sud sur le président du futur Parlement unifié. Si la réunion parlementaire de Ghadamés a enregistré la présence de 127 députés, celle présidée par Aguila Salah à Benghazi n'a reçu la participation que de 20 parlementaires.

 

On note des démarches visant à unifier la Chambre dans le but d'élire un nouveau bureau pour préparer une feuille de route politique dont la mission sera de "palier à un éventuel échec du dialogue politique libyo-libyen de Tunis sous l'égide des Nations Unies".

 

Selon le journal, la décontenance des processus pour une solution politique de la crise libyenne intervient au moment où l'accord militaire conjoint de la commission (5+5) obtenu par les négociations de Genève fait, de son côté, du surplace après l'échec des membres de la commission de traduire sur le terrain le texte de l'accord, sur fond de la poursuite de mobilisation des troupes des deux parties du conflit à savoir le gouvernement d'accord national de Tripoli, d'une part et de l'autre l'armée nationale libyenne du maréchal Khalifa Haftar basée à l'Est du pays.

 

Même si on n'a pas enregistré d'affrontements armés directs depuis la signature du cessez-le-feu, la situation sur le terrain reste très précaire à cause du refus des pays intervenant militairement en Libye de retirer les combattants étrangers qui mènent une guerre par procuration et refusent de quitter le pays. L'attaque verbale du Commandant de l'armée nationale libyenne, le maréchal Khalifa Haftar contre la Turquie qui soutient avec le Qatar, le gouvernement d'accord national reconnu par la Communauté internationale, a ajouté à la confusion qui règne actuellement sur le terrain où le maréchal autoproclamé bénéficie du soutien des Émirats arabes unis, de la Russie de la France, de l'Égypte et de l'Arabie saoudite.

 

En effet, prenant la parole à l'occasion de la célébration du 69ème anniversaire de l'indépendance de la Libye, le maréchal Khalifa Haftar a fait planer le probable retour de la guerre rendant plus confuse la situation déjà trouble en Libye ce qui pourrait signifier la fin du dialogue politique.

 

Les internautes libyens ont pris d'assaut, jeudi et vendredi, les réseaux sociaux pour critiquer, à travers des tweets, les parades militaires organisées à Tripoli et Benghazi pour célébrer le 69 anniversaire de l'accession du pays à la souveraineté internationale et les accusations échangées entre les deux parties du conflit.

 

Ils se sont demandés comment un pays peut-il célébrer son accession à la souveraineté internationale alors que 10 bases militaires étrangères sont déployées sur son sol, 20.000 soldats et mercenaires y s'activent et où interviennent au moins 7 pays étrangers que sont la Turquie, les Émirats arabes Unis, la Russie, l'Égypte, la France, Qatar et Arabie saoudite, abondant ainsi dans le même sens que Mme Williams. Ces pays décident à la place des libyennes et libyens qu'ils interdisent de prendre leur destin en main et de construire leur pays, ont-ils déploré.

-0- PANA AD/IN/IS 25dec2020