L'Envoyé de l'ONU fera pression pour le dialogue au Soudan
Port-Soudan, Soudan (PANA) – L’Envoyé personnel du Secrétaire général de l’ONU pour le Soudan, Ramtane Lamamra, se rendra la semaine prochaine à Port-Soudan et à Addis-Abeba afin d’encourager la reprise du dialogue politique, a annoncé l’ONU jeudi.
Il devrait insister sur l’urgence d’assurer la protection des civils et un accès humanitaire sans entrave au Darfour et au Kordofan.
Un haut gradé de l’armée soudanaise a exposé cette semaine les conditions nécessaires à la fin du conflit dévastateur qui ravage ce pays d’Afrique de l’Est.
Ce conflit a fait des dizaines de milliers de morts, détruit les infrastructures, mis l’économie à genoux et provoqué, dans de nombreuses régions, les pires crises humanitaires et famines au monde.
Parallèlement, les efforts se poursuivent pour amener les parties belligérantes à la table des négociations afin de mettre fin à la guerre.
Le lieutenant-général Yasser al-Atta, commandant en chef adjoint des Forces armées soudanaises (FAS), a exigé, lors d'un discours prononcé à El Obeid, dans l'Etat du Kordofan-Nord, la reddition et le retrait des Forces de soutien rapide (FSR), une milice paramilitaire contre laquelle les FAS combattent depuis le 15 avril 2023.
Selon le média soudanais Sudan Tribune, il a également réitéré ses accusations selon lesquelles les Emirats arabes unis (EAU) soutiennent des mercenaires dans le pays.
Le lieutenant-général al-Atta a rejeté toute négociation qui ne soit pas conditionnée par le retrait des FSR.
Selon Sudan Tribune, il a détaillé les conditions préalables des FAS à la paix, affirmant qu'elles constituent la décision définitive de l'Etat. Ces conditions portent sur la dissolution complète des FSR en tant que force combattante et le rétablissement du contrôle de l'Etat.
“ Les Forces armées soudanaises (SAF) exigent le retrait immédiat des forces de soutien rapide (RSF) de tous les principaux centres urbains et leur confinement dans des camps spécifiques situés exclusivement dans les Etats du Darfour Sud et Est. De plus, toutes les armes et tous les équipements de combat actuellement en possession des RSF doivent être intégralement remis aux Forces armées soudanaises. Enfin, la pleine souveraineté nationale doit être rétablie immédiatement sur toutes les infrastructures clés, y compris les points de passage frontaliers internationaux et les aéroports du pays ”, a déclaré le lieutenant-général Al-Atta.
Ce dernier a vivement critiqué les Emirats arabes unis, les accusant d'attiser le conflit et de financer des mercenaires. Il a accusé le dirigeant d'Abou Dhabi d'avoir fait venir des mercenaires de Colombie, d'Ukraine, de Libye, du Tchad, de République centrafricaine, du Soudan du Sud, du Niger et de Somalie pour combattre aux côtés des RSF.
Mercredi, les Etats-Unis ont déclaré attendre des parties belligérantes qu'elles s'engagent à respecter la trêve humanitaire proposée par le Quad, qui œuvre à la fin des combats.
C’est ce qu’a déclaré M. Massad Boulos, conseiller principal des Etats-Unis pour les affaires arabes et africaines, dans un message publié sur X, à la suite d’entretiens à Abou Dhabi (Emirats arabes unis) avec de hauts responsables gouvernementaux.
Il a dit: “ Nous attendons des Forces de soutien rapide (FSR) et des Forces armées soudanaises (FAS) qu’elles s’engagent à respecter une trêve humanitaire sans conditions préalables et qu’elles garantissent un accès humanitaire complet, sûr et sans entrave. Cette trêve est essentielle pour sauver des vies et représente une étape cruciale vers un dialogue durable, une transition vers un régime civil et une paix durable pour le peuple soudanais. ”
Le Quad, composé des Etats-Unis, des Emirats arabes unis, de l’Arabie saoudite et de l’Egypte, a proposé le 12 septembre une feuille de route pour mettre fin au conflit au Soudan. Cette feuille de route préconise une trêve humanitaire, suivie d’un cessez-le-feu et d’un processus politique menant à un régime civil.
Le commandant des FSR, Mohamed Hamdan Daglo, a annoncé lundi dernier son accord pour une trêve humanitaire.
“En réponse aux efforts internationaux, menés à l’initiative du président américain Donald Trump, nous annonçons l’accord des Forces de soutien rapide (FSR) et de leurs alliés pour une trêve de trois mois et un cessez-le-feu ”, a fait savoir M. Daglo dans une allocution vidéo.
Parallèlement, la crise humanitaire à El Fasher demeure catastrophique, les déplacements massifs de population s'accélérant et l'accès à l'aide restant limité, tandis que des alertes font état de traite généralisée, de violences sexuelles et de recrutement d'enfants. Les agences des Nations Unies indiquent que la situation continue de se détériorer dans le Nord-Darfour et le Kordofan voisin, tandis que des experts indépendants des droits humains ont averti jeudi que l'effondrement des mesures de protection suite à la chute de la ville a considérablement accru les risques encourus par les femmes et les enfants.
Les Forces de soutien rapide (FSR) ont pris le contrôle d'El Fasher, capitale de l'Etat du Nord-Darfour au Soudan, le 26 octobre, après un siège de 18 mois qui a privé les habitants de nourriture, de médicaments et d'autres produits de première nécessité.
La ville était le dernier bastion important du gouvernement dans la région du Darfour.
Selon le Programme alimentaire mondial (PAM) des Nations Unies, les familles ayant fui les combats sont désormais dispersées dans cinq localités autour d'El Fasher, dont Tawila, tandis que d'autres ont rejoint des zones plus éloignées comme Dabbah, dans l'Etat du Nord, et même la capitale nationale, Khartoum.
Actuellement, 1 485 tonnes de vivres et de produits nutritionnels – soit suffisamment pour environ 130 000 personnes – sont en route vers Tawila via le point de passage de Dabbah, venant s’ajouter à l’aide déjà apportée aux personnes déplacées en début d’année.
Parallèlement, la reprise des combats dans la région du Kordofan provoque de nouveaux déplacements massifs de population.
L’Organisation internationale pour les migrations (OIM) a indiqué que plus de 1 800 personnes ont été déplacées dans le Kordofan du Sud pour la seule journée de mardi, tandis que dans le Kordofan du Nord, près de 40 000 personnes ont été déracinées entre le 25 octobre et le 18 novembre.
La guerre au Soudan a éclaté en avril 2023 à la suite d’une lutte de pouvoir entre les Forces de soutien rapide (FSR) et les Forces armées soudanaises (FAS). Elle a rapidement dégénéré en l’une des pires crises humanitaires au monde, marquée par la famine, les déplacements massifs de population et des atrocités généralisées. Dans ce contexte, des experts indépendants en matière de droits humains ont exprimé jeudi leur inquiétude face aux informations faisant état de trafic de femmes et de filles à des fins d'exploitation sexuelle et d'esclavage sexuel, ainsi que du recrutement d'enfants comme combattants, en particulier depuis la prise de contrôle d'El Fasher par les RSF.
“ Nous sommes profondément préoccupés par les informations alarmantes concernant le trafic d'êtres humains depuis la prise de contrôle d'El Fasher et des zones environnantes par les Forces de soutien rapide (FSR) ”, ont déclaré les experts.
“Des femmes et des filles ont été enlevées dans les zones contrôlées par les FSR, et les femmes, les enfants non accompagnés et les enfants séparés de leurs familles sont exposés à un risque accru de violences et d'exploitation sexuelles. ”
Depuis le début du siège d'El Fasher en mai 2024, plus de 470 000 personnes ont été déplacées à plusieurs reprises depuis des camps tels que Shagra, Zamzam et Abou Shouk.
A travers le Soudan, près de 12 millions de personnes – dont environ la moitié sont des enfants – sont désormais déplacées de force ou ont fui vers les pays voisins, et des violences sexuelles sont signalées dans les zones de conflit à travers tout le pays.
Les experts – mandatés et nommés par le Conseil des droits de l’homme basé à Genève et n’appartenant pas au personnel de l’ONU – ont fait état de nombreux cas de viols et d’agressions sexuelles à proximité des points de contrôle des Forces de soutien rapide (FSR) et dans les sites accueillant des personnes déplacées, notamment le viol collectif de 25 femmes près de l’université El Fasher.
Ils ont exhorté toutes les parties à mettre immédiatement fin aux violations commises contre les civils et ont appelé les Etats membres à prendre des mesures urgentes à la suite de la récente session spéciale du Conseil des droits de l’homme consacrée à la situation à El Fasher et dans ses environs.
-0- PANA MA/NFB/JSG 28nov2025




