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La femme tunisienne demeure sous-représentée dans les hautes fonctions, selon Leila Mokaddem

Tunis, Tunisie (PANA) - La Tunisienne, Leila Farah Mokaddem, nouvelle directrice générale à la Banque africaine de développement (BAD) pour l'Afrique australe, déplore qu’en Tunisie, les femmes restent sous-représentées dans les hautes fonctions, malgré les acquis qu’elles ont engrangées depuis des décennies.

 

“La question ne devrait plus se poser en 2021, mais quand on regarde le paysage général, on ne voit pas beaucoup de femmes à de hauts niveaux de direction”, regrette-t-elle dans une interview à l’agence de presse tunisienne à l’occasion de la journée mondiale de la femme célébrée le 8 mars de chaque année.

   

Diplômée de l’Institut des hautes études commerciales de Carthage (IHEC) et titulaire d’un troisième cycle en politiques de commerce extérieur, Mme Mokaddem se présente comme “un pur produit de l’éducation publique tunisienne”.

 

“Honnêtement, je ne pense pas qu’il s’agit uniquement d'une question de réticences, mais d’un comportement social qui peine à changer. D’abord, la femme doit prouver doublement ou triplement, sa compétence par rapport à l’homme, pour être remarquée et sélectionnée. Ensuite, cette même femme pense encore, qu’elle ne peut postuler à une haute fonction que si elle répond à 200% aux critères du poste, alors que pour un poste pareil, un homme postule même s’il ne répond qu’à 40 à 50%, des critères demandés. Il faut donc, que les femmes aient plus confiance en elles et qu’elles prennent le risque. Je vous assure que le résultat sera étonnant”, analyse-t-elle.


  Selon elle, dans les instances internationales, notamment les banques multilatérales, il y a clairement, un parti pris pour l’égalité des genres, en encourageant les femmes à postuler aux  postes de haute direction.


  Au sein de la BAD, elle note que les récentes nominations consacrent la volonté de faire valoir le principe d’égalité des genres, mais ce principe est aussi, en train d’être favorisé dans les autres hautes institutions internationales, à l’instar du FMI (Fonds monétaire international) ou de l’OMC (Organisation mondiale du commerce).. qui ont à leur tête des femmes et qui nomment de plus en plus de femmes, dans leurs représentations régionales.


“Et n'en déplaise aux hommes, la différence est bien là en termes de résultats et de prise de décision, qui gagne beaucoup en qualité”, lance-t-elle comme un défi à la gent masculine.

 

Forte de 33 ans d’expérience professionnelle dont plus de 25, dans des instances internationales, Mme Mokaddem constate par ailleurs, que “la Tunisie n’encourage pas et n’aide pas ses compétences à l’étranger, à accéder à des postes de haut niveau, dans les grandes institutions, contrairement à d’autres pays frères et amis qui mobilisent toutes leurs forces, pour bien placer leurs ressortissants”.


  “La Tunisie regorge de compétences, mais perd des occasions énormes pour être très bien représentée dans de très grandes institutions, parce que personne n’est là pour appuyer le dossier d’une compétence nationale qui se porte candidate à un haut poste”, déplore-t-elle encore en lançant un appel aux autorités pour qu’elles les appuie et les soutienne, car ce sont les meilleurs ambassadeurs du pays à l’étranger.

 

Interrogée sur sa mission au sein de la Banque africaine de Développement, Mme Mokaddem qui y exerce depuis 2002 après un passage au FMI, rappelle que la BAD a pour objectif premier, de faire reculer la pauvreté dans les pays africains et de contribuer au développement économique et durable et au progrès social. La vision de la BAD est déclinée autour de cinq priorités, à savoir nourrir l’Afrique, industrialiser l’Afrique, éclairer l’Afrique, intégrer l’Afrique et améliorer la qualité de vie des Africains.


Pour mettre en œuvre cette stratégie, la BAD qui est un bailleur de fonds multilatéral, déploie ses moyens financiers pour les consacrer aux investissements publics et privés dans tous les pays africains.
 

Quant à sa mission actuelle, elle consiste à gérer le hub Afrique Australe qui couvre 13 pays. “Concrètement, je pilote les opérations de la Banque dans ces pays, en appuyant le développement économique et social et en accompagnant les réformes de leurs politiques économiques et sectorielles, y compris dans des domaines clés comme ceux relatifs aux énergies renouvelables, aux changements climatiques, à l’industrialisation, à l’agriculture intelligente et à l’emploi des jeunes.


Pour ce faire, je dois veiller à articuler les stratégies de partenariat de la BAD, avec les pays de la région Afrique australe, selon les besoins de chaque pays”, détaille-t-elle.

-0- PANA BB/IS 08mars2021